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Les chaines musculaires, physiologiques ou dysfonctionnelles ?

Article écrit par Ludovic HAREL masseur-kinésithérapeute et ostéopathe.

 

Si la notion de chaine musculaire est bien assimilée par le monde de la kinésithérapie aujourd’hui, entre autres grâce à l’apport de disciplines globales comme l’ostéopathie, la fasciathérapie ou la posturologie, son application pratique, son investigation clinique et son traitement manuel spécifique restent encore approximatifs pour beaucoup de praticiens.

 

les chaines musculaires sont, avant tout, un mécanisme physiologiqueEffectivement, les chaines musculaires sont, avant tout, un mécanisme physiologique et fonctionnel permettant de coordonner de manière intégrée plusieurs maillons articulaires autour d’une tâche précise. Cette tâche peut être simplement la lutte anti gravifique, la marche, le lancer, ou encore l’écriture. Dans d’autres cas, elles seront exploitées de manière intelligente par notre système neuromoteur pour permettre de maintenir la fonction alors qu’un ou plusieurs maillons ont perdu une partie de leur mobilité ou de leur capacité motrice. Dans cette stratégie de suppléance ou de dérivation, la perte d’économie pourra se traduire par l’apparition de gênes, de maladresses voire de douleurs justifiant une plainte du patient. Et parfois même, ce mécanisme occasionnera l’apparition de symptômes voire de pathologies dans des zones non dysfonctionnelles, simplement situées « en bout de chaine de compensation », comme c’est souvent le cas pour les cervicalgies symptomatiques par exemple.

Les chaines musculaires ne sont que rarement la cause du problème mais elles en sont toujours le vecteur !

Ex : Le syndrome postural


les muscles oculo-moteurs

Il concerne principalement les chaines musculaires anti gravifiques, et si la symptomatologie est dominée par des troubles musculosquelettiques récurrents, ces derniers n’en sont que rarement la cause.

Effectivement, une des rares constantes du corps humain reste le regard à l’horizontal, car les muscles oculo-moteurs sont les muscles du corps humain les plus pauvres en unités motrices et sont, de fait, extrêmement fatigables, ils doivent donc être placés bien au centre des orbites pour permettre la poursuite oculaire et la vision binoculaire, mais également assurer le contrôle de l’équilibre et de la posture par leur synergie avec le système vestibulaire. En conséquence de quoi, quelles que soient la nature des dysfonctions en dessous, elles seront compensées, plus haut ou plus bas pour maintenir cette horizontalité.

C’est par ce mécanisme qu’un problème d’appui, une hernie discale, une prothèse de hanche avec différence de longueur des membres inférieurs,multitude d’adaptations faites pour parvenir à un équilibre global colopathie fonctionnelle ou une dysfonction vertébrale, se verront fréquemment accompagnés d’une multitude d’adaptations faites pour parvenir à un équilibre global au niveau sous-occipital via les chaines musculaires anti gravifiques.

Le thérapeute qui agira mécaniquement en « débloquant » chacune de ces adaptations sans en comprendre la cause, n’améliorera pas son patient et parfois l’aggravera en ajoutant à son problème initial, une désorganisation musculosquelettique souvent fortement inconfortable pendant plusieurs jours après la séance, ce que le patient mécontent ne se gênera pas de signifier au praticien pourtant bien intentionné.

 

Ce mécanisme physiologique possède donc la capacité « d’exporter » un problème local pour le diluer dans la chaine, mais que se passe-t-il quand il se heurte à d’autres mécanismes de compensations ou à la fatigue par exemple ?

Vous l’expérimentez quotidiennement dans vos cabinets sans forcément en comprendre le mécanisme. Le patient consulte en vous disant cette phrase toujours déconcertante : « je ne sais pas ce que j’ai fait pour avoir mal ? » ou encore « je me suis levé bloqué ce matin, ça doit venir d’une mauvaise position pour dormir ou de mon lit ».

je ne sais pas ce que j’ai fait pour avoir mal A chaque fois qu’un symptôme apparait en médecine, sans motifs apparents, on recherche ce que l’on appelle en sémiologie, les « signes d’accompagnements » qui vont permettre de nous donner une direction pour l’investigation. Voilà l’intérêt principal de connaitre les chaines musculaires,pouvoir s’orienter pour remonter jusqu’à la, ou les, sources qui ont abouti à ce phénomène de décompensation.

Cette démarche n’est pas innée pour nous, kinésithérapeutes, formés à rééduquer par zonage, et demande une vision globale et une compréhension suffisante pour pouvoir justifier au patient que sa douleur au dos vient, en partie « d’ailleurs ». Pour cela, pas de secrets, il faut se former. Les ostéopathes mettent environ 5 à 6 ans à acquérir ce « réflexe » qui fonde leur discipline dite « holistique », mais il n’y a jamais deux schémas identiques, il faut donc être capable d’effectuer une investigation manuelle précise des contractures pour s’adapter à chaque patient.

 

Ex : Le syndrome fémoropatellaire des adolescentes

Autre motif de consultation fréquent et déconcertant, les syndromes fémoropatellaires de la jeune femme, qui dans certains cas s’installent sans qu’aucune cause mécanique oualgoménorrhées traumatique ne soit retrouvée à l’anamnèse, les poussées de croissance seront alors mises en avant, ou encore un « mauvais axe biomécanique entre la rotule et la gorge de la trochlée devenu subitement symptomatique ».

On se retrouvera, dès lors, à devoir agir localement sur une articulation déjà victime de problèmes sus-jacents auxquels viendront se greffer les contraintes d’une rééducation active. Les chaines musculaires en jeu dans ce cas de figure adaptent des contraintes gynécologiques dont le lien semble tellement lointain, pour certains, qu’ils ne pensent pas à poser la question des algoménorrhées (règles douloureuses). Beaucoup de jeunes filles souffrent de règles douloureuses, et ce sujet « tabou », n’est pas évoqué par pudeur ou oubli, et pourtant les spasmes utérins et l’inflammation, parfois quasi permanente, vont influer de manière insidieuse et silencieuse sur le bassin et la mise en place d’une attitude antalgique engageant les muscles adducteurs et sartorius, entre autres, en modifiant irrémédiablement les fameux axes et appuis des membres inférieurs.

 

 

 

 

L’investigation des chaines

Les chaines musculaires sont comme les voies ferréesLes chaines musculaires sont comme les voies ferrées, si le train n’est pas à quai, nul besoin d’aller le chercher n’importe où, il nous suffit de remonter la voie à l’envers pour déterminer où se situe l’obstacle. C’est pareil pour les chaines musculaires, lorsqu’un patient consulte en nous expliquant qu’il a mal à un endroit et que rien ne justifie localement ce symptôme, on peut être sûr qu’on trouvera le responsable en remontant la chaine, et parfois, il faut aller loin, voire à l’autre bout ! C’est un fait bien connu des pratiquants de trail, de marathon et par les posturologues. La talalgie plantaire, par exemple, n’est pas forcément le fait d’un mauvais chaussage, il faut parfois remonter jusqu’à la mâchoire et l’occlusion pour comprendre pourquoi un appui a suffisamment changé pour occasionner ce type de symptômes…

L’investigation se fera dans la majorité des cas par la palpation précise des muscles constituant cette chaine, ce qui signifie qu’il faut êtrela palpation précise des muscles suffisamment précis dans sa palpation et son repérage pour individualiser chacun d’entre eux, mais pour certains muscles profondément situés, on utilisera plutôt des tests d’extensibilité pour détecter le maillon faible. C’est ainsi que nous allons être en mesure d’interroger le corps et de retrouver parfois, au grand étonnement de nos patients, d’anciens traumatismes oubliés lors de l’anamnèse.

Nous parviendrons alors à « remonter le temps » pour essayer de reconstituer le puzzle qui mène notre patient à consulter. Mais attention, les chaines musculaires ne sont que rarement la cause du problème même si elles en sont toujours le vecteur !

Autre ex : La tendinite de la « souris »

La tendinite de la « souris »Un autre mécanisme de compensation opère dans une symptomatologie bien connue dans nos cabinets, l’épicondylite non traumatique. Il s’agit fréquemment plus de myosites (ou de points trigger) consécutifs à une hypertonie compensatrice de dysfonctions de mobilité au niveau du poignet et/ou de la main, qui vont se manifester par simple usage d’une souris d’ordinateur par exemple !!!

Mais si les chaines musculaires ne sont pas systématiquement à l’origine des troubles musculosquelettiques, les négliger serasystématiquement source de récidives ou d’amélioration incomplète, car les contractures installées parfois depuis de nombreux mois ou années ne cèderont pas sans un traitement ciblé et raisonné du praticien.

 

Les levées de tensions musculaires, un outil redoutablement efficace pour traiter les chaines musculaires dysfonctionnelles.

Herman KABAT
Herman KABAT
Charles SHERRINGTON
Charles SHERRINGTON

Les levées de tensions musculaires, ou techniques myotensives, s’appuient sur 2 principes neurophysiologiques découverts et exploités depuis le début du XXe siècle par Charles SHERRINGTON et Herman KABAT, entre autres, que sont les notions de période réfractaire, ou relaxation post-isométrique, et d’innervation réciproque.

Dans les 2 cas, on va exploiter sur une courte période, l’inhibition du réflexe myotatique, empêchant habituellement le relâchement de la contracture musculaire ciblée, en étirant le muscle après l’avoir contracté, ou son antagoniste, en respectant un axe bien précis, et ce, sans dépasser la « barrière motrice ».

La technicité repose sur l’orientation de l’étirementLa technicité repose sur l’orientation de l’étirement, précise pour s’adresser uniquement à la portion depériarthrite scapulo-humérales, muscle contracturé et le « timing », pour ne pas chercher à gagner trop tôt, trop fort ou trop loin. C’est la raison pour laquelle, une technique de levée de tension n’est pas un simple étirement et nécessite une formation complète pour être exploitée efficacement.

Une fois maitrisées, ces techniques s’avèrent être de formidables alliées dans la prise en charge de nos patients chroniques et un moyen inégalable, lorsque le patient vient à temps, pour éviter des lésions parfois irréversibles sur un des maillons de cette chaine, comme c’est le cas dans beaucoup de périarthrite scapulo-humérales, diagnostiquées trop tard pour pouvoir résoudre le problème sans avoir à en traiter la conséquence.

 

Le podcast :

Pour approfondir le sujet :


LLudovic HAREL, formateur kiné-formationsudovic HAREL est masseur-kinésithérapeute et ostéopathe depuis 20 ans.

 

Réserviste opérationnel depuis plus de 8 ans dans le secteur de la sûreté, il s’est formé parallèlement au métier de détective privé avant d’obtenir de nombreuses certifications dans le domaine du profilage et de l’analyse comportementale (détection de la malveillance, PNL, Process COM, Lab Profil, détection du mensonge, négociation entres autres).

Il est formateur depuis 2021 chez Kiné-Formations et consultant dans le domaine des sciences-cognitives appliquées aux relations patient-praticien.

 

Les autres parutions de Ludovic :

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